Tel
est bien, chers amis, le rendez-vous et le thème que je vous propose !
Le
thème de cette journée et de la DMS, « Bâtir ensemble l’Eglise de demain »
porte notre attention sur ce que le Christ disait à Pierre après sa profession
de foi « Tu es Pierre et sur cette
pierre je bâtirai mon Eglise. » Il est intéressant de noter que le nom
donné par Jésus, dans sa langue, à son apôtre est Kefa ce qui signifie le roc. Jésus a fait de Simon un roc, un roc
sur lequel il bâtit son Eglise. Ce qui
veut dire que c’est bien, à la fois, sur la personne de Pierre (avec ses
richesses et ses limites, ses pauvretés, sa fragilité…) et la foi qu’il
confesse, qu’Il construit son Eglise. De même aujourd’hui, c’est bien avec
nous, les personnes que nous sommes (et nos personnalités différentes) qui
expriment et professent la foi de l’Eglise, que le Christ continue de
« bâtir son Eglise ».
Bien évidemment, nous le savons, le Christ
ne « bâtit pas son Eglise » avec nous pour elle-même, mais pour la
mission en ce monde en pleine
mutation. Un monde qui s’interroge et nous interroge aussi sur son
environnement, les migrations, son système économique, la bioéthique… Et c’est
bien à lui, à l’écoute de ce monde-là, que le Seigneur nous envoie pour y
entendre les appels missionnaires. Il
nous envoie à ce moment même où le christianisme n’a plus la côte de popularité
dans le public en général, notamment en raison des contre-témoignages qui
ont blessé l’Eglise. A l’heure où nous nous posons des questions sur la survie
de nos communautés, un peu plus dans le rural, à l’heure où nous nous
interrogeons sur notre propre avenir, à l’heure où nous avons conscience de nos
pauvretés, il nous faut poursuivre la mission.
Oui, chers amis, c’est toujours l’heure
– même si nous sommes pauvres et que nous traversons des temps difficiles -, de
l’annonce de l’Evangile et de la transmission de la foi. Elles
demeurent, depuis la naissance de l’Eglise avec les apôtres et la Mère de
Jésus, notre mission, notre raison
d’être : « Allez donc de
toutes les nations faites des disciples […] Et voici que je suis avec vous tous
les jours, jusqu’à la fin des temps. (Mt 28, 19-20). Cette mission, confiée
par le Christ, n’a pas comme préalable la puissance de nos moyens matériels et
humains. Le Christ, le Ressuscité, connait nos limites et pourtant il nous
engage à nous mobiliser pour cette expérience passionnante.
Nous sommes très nombreux à porter au
plus profond de nous, plus ou moins secrètement souvent, le désir du
renouvellement de nos communautés, de la croissance de nos mouvements, en un
mot la croissance de notre Eglise.
Cela ne doit pas être tabou. Le défi est immense, et à première vue, à vue
humaine, je dirais que c’est impossible. Beaucoup sont tentés de dire
« nous n’avons plus l’âge ni les capacités et encore moins les ressources
pour une si grande mission » ! C’est une évidence : si nous nous
appuyons sur nos propres forces, si nous tentons de réaliser cela seuls, c’est
illusoire !
Mais, si nous nous laissons renouveler
et transformer par l’Esprit Saint, si
nous plongeons encore davantage nos racines dans la parole de Dieu, surtout
l’Evangile, et dans les sacrements, si nous investissons le meilleur de nos
énergies à bâtir nos vies et nos communautés en nous assurant que le Christ en
soit le centre, nous deviendrons de plus en plus des chrétiens enflammés par un
amour qui est prêt à tout pour qu’Il soit mieux connu, aimé et servi. Et cette
action de l’Esprit est véritablement contagieuse. Elle change et transforme nos
vies, nos communautés et notre monde.
On
me dit régulièrement, « Comment faire, Monseigneur ou Père,
pour devenir des communautés plus vivantes pour la mission ? ».
Une communauté vivante se reconnait par la
vie fraternelle qui rayonne et par l’implication
de tous les baptisés qui assurent la vie et l’animation de la communauté.
Dans un texte qui avait eu un fort retentissement en 2009, Benoit XVI rappelait
avec force que les laïcs par leur baptême
ne doivent plus être considérés comme une aide aux prêtres, ni même comme de
simples collaborateurs, mais des coresponsables de l’être et de l’agir de
l’Eglise. Il invitait déjà à une conversion pastorale et missionnaire de
l’Eglise pour vivre la mission dans le contexte qui est le nôtre aujourd’hui.
Tous en communion pour la mission, nous aurons donc à nous mettre ensemble pour
réfléchir et esquisser une vision
pastorale et des axes prioritaires pour les dix, les vingt ans à venir dans
notre diocèse et dans chacune de nos paroisses, nos communautés chrétiennes.
Une
vision pastorale et des axes prioritaires qui tiennent compte de la diversité
des situations, des talents des uns et des autres, de ceux et celles qui sont
malades et fatigués, des plus pauvres et des plus petits, pour ouvrir des
chemins d’avenir et continuer de bâtir notre Eglise vivante pour la mission.
Oui, cherchons ce qu’il y a de mieux pour l’ensemble de notre Eglise. Regardons
comment nous pouvons nous enrichir mutuellement, nous entraider pour rejoindre
les nouvelles générations.
Laissons-nous convertir et transformer
pour la mission !
Dans
son exhortation apostolique « La
joie de l’Evangile », le pape François nous invite à cette conversion
et transformation pour la mission par ces mots : « J’espère que toutes les communautés feront
en sorte de mettre œuvre les moyens nécessaires pour avancer sur le chemin
d’une conversion pastorale et missionnaire, qui ne peut laisser les choses
comme elles sont. Ce n’est pas d’une simple administration dont nous avons
besoin. Constituons-nous dans toutes les régions de terre en un état permanent
de mission » N° 25 EG (La joie de l’Evangile).
Oui,
frères et sœurs, laissons-nous toucher et transformer par la fraîcheur de
l’Evangile. Faisons confiance en l’avenir avec Celui sur qui se fonde notre foi
et nous envoie en mission dans ce monde et prenons au sérieux cet appel à vivre
ensemble la mission.
« Bâtir
ensemble l’Eglise de demain »
+ Philippe MOUSSET, Evêque de Périgueux et Sarlat
Texte publié dans Église en Périgord, Septembre 2019